Retraite : pourquoi dit-on que les mères sont systématiquement désavantagées ?

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On pourrait croire que les femmes, avec leur espérance de vie plus longue, sont avantagées à la retraite. En réalité, ce sont elles – et tout particulièrement les mères – qui en sortent le plus souvent pénalisées. Derrière cette apparente longévité se cache un parcours semé d’embûches, où les inégalités salariales, les carrières fragmentées et les sacrifices familiaux laissent des traces durables sur leur pension.

Des carrières interrompues et un départ à la retraite plus tardif

Selon le dernier rapport de la Drees, les femmes partent à la retraite en moyenne à 63 ans, soit près d’un an de plus que les hommes. La principale raison : une carrière souvent hachée. Congés maternité, arrêts parentaux, travail à temps partiel… Ces choix – ou contraintes – liés à la maternité pèsent lourdement dans le calcul des droits à la retraite.

Certes, des dispositifs compensatoires existent. Depuis les années 1970, les mères peuvent obtenir jusqu’à 8 trimestres supplémentaires par enfant : 4 pour la maternité ou l’adoption, et 4 pour l’éducation. Mais ces trimestres ne suffisent pas toujours à combler les écarts. D’autant que :

  • 2 trimestres pour l’éducation peuvent être attribués au père si les parents le décident ;
  • les périodes de congé parental ne peuvent pas être cumulées avec d’autres majorations ;
  • les interruptions de carrière réduisent mécaniquement les cotisations et donc le montant final de la pension.

Résultat : même lorsqu’elles atteignent l’âge légal, de nombreuses femmes prolongent leur activité pour espérer une pension décente grâce à une surcote. Mais la dernière réforme, qui recule l’âge légal de 62 à 64 ans, rend cette perspective encore plus difficile à atteindre, surtout dans les métiers physiquement éprouvants souvent occupés par des femmes.

Des pensions bien inférieures à celles des hommes

La réalité est cruelle : en France, les femmes retraitées perçoivent en moyenne une pension de 1 268 euros brut par mois, contre 2 050 euros pour les hommes. Soit un écart de près de 40 %. Ce fossé s’explique par plusieurs facteurs :

  • des inégalités salariales persistantes tout au long de la vie professionnelle ;
  • des postes occupés souvent moins rémunérateurs (soins, nettoyage, emploi à domicile…) ;
  • un temps partiel subi pour plus d’un quart des femmes, contre moins de 10 % des hommes ;
  • des interruptions fréquentes pour s’occuper des enfants, en l’absence de solutions de garde abordables.

Et même si une majoration de 10 % est accordée aux parents de trois enfants ou plus, cela ne suffit pas à corriger le déséquilibre. Ce bonus est d’ailleurs critiqué pour son manque d’équité, puisqu’il est attribué de manière identique au père et à la mère, quel que soit leur niveau d’implication familiale ou de revenu.

Une inégalité qui se creuse encore avec l’âge

Contrairement à certaines idées reçues, les femmes travaillent plus longtemps en moyenne avant de prendre leur retraite, et finissent avec une pension bien plus faible. La précarité est donc doublement présente : en fin de carrière, et une fois à la retraite. Elles sont d’ailleurs surreprésentées parmi les retraités aux petites pensions, avec toutes les conséquences que cela implique : difficulté à se loger, à se soigner, à maintenir un lien social.

Repenser la retraite pour ne pas pénaliser les mères

Ce constat met en lumière un système qui, malgré les ajustements, continue à défavoriser les mères. Si les femmes sont de plus en plus présentes sur le marché du travail, les réformes tardent à prendre en compte la réalité de leur parcours professionnel et familial. Offrir plus de solutions de garde, revaloriser les métiers féminisés et reconnaître pleinement le poids du travail parental dans le calcul des droits à la retraite : autant de pistes à creuser pour une retraite plus juste.

En attendant, ce sont encore les mères qui paient le prix fort. Et ce prix se mesure en années de labeur supplémentaires, pour une pension souvent dérisoire.


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