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Le sujet revient sur le devant de la scène. Alors que les finances du système de retraite restent fragiles, le dispositif de cumul emploi-retraite pourrait bientôt être revu à la baisse. Ce mécanisme, censé inciter les seniors à rester actifs tout en percevant leur pension, est aujourd’hui jugé trop avantageux pour certains et inégalitaire. Un rapport récent de la Cour des comptes vient remettre de l’ordre dans ce débat sensible.
Un système jugé trop généreux pour les plus aisés
Initialement pensé comme un levier pour prolonger la vie active, le cumul emploi-retraite est aujourd’hui dans le viseur. Dans un rapport publié le 26 mai 2025, la Cour des comptes dénonce des dérives dans l’usage du dispositif. Selon elle, il profite majoritairement aux retraités déjà confortablement installés financièrement.
En 2020, environ 710 000 personnes avaient recours à ce dispositif, souvent avant d’avoir atteint l’âge légal du taux plein. Résultat : certains retraités cumulaient une pension confortable avec une activité rémunérée, sans que cela n’impacte leurs droits. Pire, près de 10 % des bénéficiaires âgés de moins de 67 ans percevaient une retraite supérieure à la moyenne nationale, tout en continuant à travailler. Une situation qui interroge sur l’équité du système, initialement prévu pour aider les profils modestes ou ceux exerçant des métiers pénibles.
Un cadre plus souple que chez nos voisins européens
Autre point souligné par la Cour : la France ferait figure d’exception. Comparée à d’autres pays européens comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, la législation française est nettement plus permissive en matière de cumul emploi-retraite. Ailleurs, des plafonds de revenus sont imposés aux retraités actifs, surtout avant le taux plein.
Chez nous, cette liberté engendre des effets d’aubaine. Certains retraités cumulent des revenus totaux proches, voire supérieurs, à ceux des actifs à temps plein. En 2020, un « cumulard » touchait en moyenne 2 300 € par mois, quand un salarié classique gagnait 2 518 €. Un écart faible qui alimente la polémique : est-il normal que certains retraités gagnent presque autant, voire plus, qu’un actif ? Cette dynamique accentue les inégalités entre générations, mais aussi entre retraités eux-mêmes.
Une réforme ciblée en préparation
Pour corriger ces déséquilibres, la Cour des comptes propose plusieurs pistes. L’idée principale : limiter le montant des pensions versées lorsque le retraité cumule une activité avant l’âge légal du taux plein. Autre option envisagée : instaurer un critère de ressources pour encadrer ce cumul.
Ces mesures permettraient de réserver les avantages du dispositif à ceux qui en ont réellement besoin. En parallèle, elles encourageraient un départ plus tardif à la retraite, en phase avec les enjeux économiques actuels.
La réforme envisagée pourrait également alléger la pression sur les finances publiques. Selon les projections de la Cour, jusqu’à 400 millions d’euros pourraient être économisés chaque année grâce à ces ajustements. Des sommes bienvenues pour le budget de la Sécurité sociale, régulièrement sous tension.
Un signal pour le gouvernement
Le gouvernement, qui travaille sur une refonte globale du système de retraite depuis 2023, pourrait bien s’inspirer de ces recommandations. La réforme du cumul emploi-retraite s’inscrirait ainsi dans une logique plus large, mêlant justice sociale et viabilité économique.
L’objectif affiché serait alors double : garantir une meilleure redistribution des avantages et inciter les seniors à poursuivre leur activité dans de bonnes conditions, sans creuser les inégalités. Reste à savoir si ces mesures passeront le cap du consensus politique.
Si le projet voit le jour, les retraités concernés devront s’adapter. Ceux qui espéraient cumuler librement emploi et retraite avant 67 ans pourraient bien voir leurs plans modifiés. Et pour tous les autres, c’est peut-être le signe qu’un nouveau modèle de retraite se dessine peu à peu en France.