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Malgré la loi Kasbarian censée protéger les propriétaires, certains squatteurs continuent de s’installer illégalement dans des logements. À Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne), un appartement devient le théâtre d’une nouvelle affaire qui met en lumière les limites de cette législation. La loi de 2023 promettait d’expulser rapidement les intrus, mais les propriétaires restent parfois démunis.
Quand la loi rencontre ses limites
Pierre, 34 ans, est propriétaire d’un studio qu’il a acheté en janvier. Depuis plusieurs semaines, il n’y a plus accès. Une squatteuse a réservé le logement pour une semaine via une plateforme en ligne, changé les serrures et refuse depuis de quitter les lieux. La situation illustre parfaitement les zones d’ombre de la loi Kasbarian.
Cette loi anti-squat devait permettre d’ordonner une expulsion en moins de 72 heures, même pendant la trêve hivernale, si intrusion ou effraction étaient constatées. Mais ici, aucune effraction n’a été commise. La squatteuse est entrée légalement, au regard du contrat signé sur la plateforme de réservation, contournant ainsi la protection offerte par la législation.
Une faille juridique surprenante
« La loi anti-squat a été un vrai progrès mais dans ce cas, l’enjeu c’est de savoir si elle a la qualité de squatteur parce qu’elle n’est pas rentrée en forçant la serrure« , explique maître Romain Rossi-Landi, avocat en droit immobilier, sur RMC et RMC Story.
« Mais elle est rentrée en signant un contrat via la plateforme Booking. Les squatteurs ont trouvé la faille parce que la loi Kasbarian ne s’applique pas à cette dame qui n’est pas rentrée par effraction », poursuit-il. Résultat : Pierre doit désormais passer par la voie judiciaire classique, avec une audience fixée en 2027. Un délai de deux ans avant de pouvoir récupérer son logement.
Les propriétaires face à un cauchemar
Cette situation n’est pas isolée et illustre le cauchemar des propriétaires confrontés aux locations squattées. L’avocat précise :
- « Le délit de violation de domicile condamne le squat en cas d’introduction frauduleuse » ;
- « Ici, il n’y a pas eu d’effraction, mais il y a maintien frauduleux par manœuvre » ;
- « Un préfet un peu audacieux pourrait accorder le concours de la force publique pour expulser la personne ».
La manœuvre de la squatteuse est claire : « D’avoir triché dès le début, elle savait très bien qu’elle n’allait pas s’installer, si ce n’est pas une fraude, c’est une manœuvre ». Cette subtilité juridique la place dans un cadre difficile à contester rapidement pour le propriétaire.
La crise du logement entretenue par ces failles
Face à cette situation, comment les propriétaires peuvent-ils se protéger ? Malheureusement, il n’existe pas de solution simple. Selon l’avocat, les squatteurs passent souvent par des plateformes de location comme Airbnb ou Booking, échappant ainsi aux vérifications classiques de solvabilité et de garanties financières.
Le résultat est inquiétant :
- Les propriétaires se retrouvent bloqués dans de longues procédures ;
- Les expulsions peuvent prendre des années ;
- Beaucoup arrêtent de mettre leur logement en location, aggravant la crise du logement.
La loi Kasbarian a été une avancée, mais elle montre ses limites face à des stratégies qui contournent les règles. Les propriétaires doivent désormais naviguer dans un système judiciaire complexe pour récupérer leurs biens, souvent avec patience et persévérance. Entre délais interminables et coûts judiciaires, la protection contre le squat reste un parcours semé d’embûches.
Cette affaire de Savigny-le-Temple illustre un problème plus vaste : la législation peine à suivre les nouvelles méthodes d’occupation illégale. Entre innovation juridique des squatteurs et lenteur administrative, les propriétaires restent sur le fil du rasoir, espérant que de futures évolutions légales viendront combler ces failles.