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De plus en plus de personnes se tournent vers la livraison en tant qu’auto-entrepreneur, attirées par la souplesse des horaires et la promesse d’une certaine indépendance. Mais derrière cette liberté, la réalité financière peut parfois être moins séduisante. Charlène, livreuse depuis 2020, partage son expérience et dresse un bilan honnête : après le carburant, les charges et les impôts, que lui reste-t-il vraiment ?
Pourquoi j’ai choisi la livraison comme activité principale
Tout a commencé en mars 2020. En plein bouleversement sanitaire, alors que beaucoup perdaient leur emploi ou étaient mis à l’arrêt, j’ai décidé de me lancer comme livreuse indépendante. Les plateformes de livraison explosaient, et le besoin de services à domicile n’avait jamais été aussi fort.
Je travaille principalement pour des applis de livraison de repas, mais il m’arrive aussi de livrer des colis ou des courses alimentaires selon les offres. Mes semaines tournent autour de 40 heures, souvent concentrées en soirée et durant les week-ends, là où la demande est la plus forte.
Mon outil de travail : une voiture et beaucoup d’essence
Contrairement à certains collègues qui optent pour un vélo ou un scooter, j’utilise ma Renault Clio de 2017. Elle me permet de couvrir une large zone, d’honorer des livraisons plus importantes et de ne pas dépendre de la météo. C’est un choix stratégique, mais qui a un coût non négligeable.
La voiture me donne une liberté de mouvement plus grande, mais elle implique aussi des dépenses régulières : carburant, entretien, assurance… Des frais que l’on oublie souvent quand on parle de chiffre d’affaires brut.
Mes revenus et mes principales dépenses
En moyenne, je dégage un chiffre d’affaires mensuel d’environ 2800€. C’est un montant variable : il augmente quand il pleut ou en hiver, et chute pendant les vacances ou les fortes chaleurs. Mais cette somme ne reflète pas mon vrai revenu, car les charges sont nombreuses.
Voici comment se répartissent mes dépenses mensuelles :
- Carburant : entre 380 et 420€ ;
- Entretien du véhicule : environ 150€, lissé sur l’année ;
- Assurance professionnelle : 65€ ;
- Forfait téléphonique avec data : 45€ ;
- Cotisations sociales : environ 22 % de mon chiffre d’affaires.
Sur le seul carburant, je roule entre 3000 et 3500 kilomètres par mois. C’est mon poste de dépense le plus lourd, et le plus imprévisible selon le prix à la pompe.
Combien il me reste vraiment à la fin du mois ?
Après avoir tout déduit — essence, cotisations, frais divers — il me reste en moyenne entre 1500 et 1600€ par mois. Mais ce n’est pas fini. Il faut encore enlever l’impôt sur le revenu, qui me coûte entre 100 et 150€ mensuels selon ma situation.
En résumé, je touche entre 1350 et 1450€ nets pour 40 heures de travail par semaine. Ça peut paraître peu, surtout si l’on regarde le chiffre d’affaires brut, mais c’est le reflet exact de la réalité terrain.
Ce qui influence vraiment ma rentabilité
Ce que je gagne dépend de plusieurs facteurs :
- ma localisation : en ville, les commandes sont plus nombreuses ;
- le véhicule utilisé : un vélo coûte moins cher, mais limite les livraisons ;
- la plateforme : certaines paient mieux que d’autres ;
- ma manière d’optimiser les trajets : moins je roule, plus je gagne ;
- le prix du carburant : une hausse de 10 centimes me fait perdre 30 à 40€ par mois.
Tout est une question d’ajustement. Il m’est arrivé de refuser des commandes non rentables juste pour éviter de faire des kilomètres à vide.
Ce que je retiens après 4 ans sur la route
La livraison indépendante permet une vraie liberté au quotidien : je choisis mes horaires, je suis seule maître à bord, et je peux adapter mon rythme selon mes besoins. Mais cette liberté a un prix. En réalité, une fois tout payé, je gagne à peine plus qu’un SMIC, avec une fatigue physique bien présente.
Ce métier m’a appris à mieux gérer mes finances, à anticiper les coûts cachés, et à garder un œil sur chaque centime. Si vous envisagez de vous lancer, je vous conseille de bien faire vos calculs et de ne pas sous-estimer les dépenses liées au véhicule.
Être son propre patron, c’est grisant. Mais il faut aussi savoir jouer les comptables, les mécaniciens… et parfois les négociateurs pour tirer le meilleur des plateformes. Un métier complet, mais exigeant.