Budget 2026 : la France prête à alourdir la facture des géants du numérique ?

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Les grandes entreprises du numérique comme Google, Meta, Amazon ou Netflix pourraient bientôt devoir payer bien plus cher en France. En marge des débats sur le budget 2026, plusieurs députés veulent renforcer la fameuse taxe GAFAM et imposer une nouvelle contribution sur l’usage des réseaux de communication. Deux mesures qui pourraient changer la donne dans le monde du digital.

Une taxe GAFAM qui pourrait bondir à 15 %

La question est sur la table : faut-il faire payer davantage les géants du web ? Instaurée en 2019 pour corriger les inégalités fiscales entre entreprises étrangères et acteurs français, la taxe GAFAM est aujourd’hui fixée à 3 %. Mais certains députés souhaitent la porter à 15 % – soit cinq fois plus.

Cette idée a été avancée par Jean-René Cazeneuve, député Renaissance, dans un amendement récemment examiné par la commission des finances. Il propose non seulement de relever le taux, mais aussi d’augmenter le seuil de taxation mondiale à 2 milliards d’euros, contre 700 millions actuellement. Son argument est simple : « Le rendement actuel, environ 700 millions d’euros en 2024, est sans commune mesure avec les profits réalisés en France par les grands groupes du numérique. »

Cette proposition n’apparaît pas dans la version initiale du projet de loi, mais elle pourrait être réintroduite pendant les débats à l’Assemblée nationale. Le sujet risque de diviser : certains élus estiment qu’une telle hausse pourrait encourager les géants du numérique à revoir leur implantation en France, tandis que d’autres jugent ce durcissement nécessaire pour rétablir l’équité fiscale.

Un débat budgétaire sous tension

Les discussions autour du budget 2026 s’annoncent tendues. Après le rejet de la première partie du texte par la commission des finances, les députés reprennent le débat en séance plénière. Si aucun accord n’est trouvé d’ici 70 jours, le gouvernement pourra adopter le budget par ordonnance, comme le permet l’article 47 de la Constitution.

Ce contexte politique tendu n’empêche pas certains parlementaires de défendre leurs propres priorités fiscales. L’objectif affiché : trouver de nouvelles sources de financement sans alourdir la pression sur les ménages. Et les géants du numérique apparaissent comme une cible toute trouvée.

Vers une contribution des géants du streaming et du cloud ?

Une autre idée revient dans le débat : faire participer les principaux fournisseurs de contenus – comme Netflix, Google, Meta ou Amazon – au financement des infrastructures télécoms qu’ils utilisent massivement. Selon le dernier rapport de l’Arcep, ces cinq acteurs génèrent à eux seuls près de 47 % du trafic Internet en France.

Le député RN Jean-Philippe Tanguy a proposé une « contribution annuelle forfaitaire » de 12 000 euros par Gb/s d’utilisation moyenne, réservée aux acteurs utilisant une bande passante supérieure à 1 Gb/s. L’idée serait de faire participer ces entreprises aux investissements nécessaires pour maintenir et moderniser les réseaux. Mais la proposition a été jugée irréaliste et rejetée en commission. *« Idée délirante, tarif délirant »*, a réagi Pierre Beyssac, porte-parole du Parti Pirate.

Malgré ce rejet, le député a réintroduit son amendement en séance plénière. Même si ses chances d’adoption sont faibles, cette initiative relance un débat récurrent : faut-il imposer une forme de participation financière aux acteurs qui consomment le plus de bande passante ?

Les télécoms réclament des accords plutôt qu’une taxe

Du côté des opérateurs, la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms) soutient l’idée d’une contribution, mais sous une autre forme. Elle préfère des accords commerciaux entre les fournisseurs d’accès à Internet et les grandes plateformes, plutôt qu’une taxe supplémentaire. *« Les big tech sont des passagers clandestins profitant d’une asymétrie délétère pour l’Europe »*, peut-on lire dans une tribune publiée dans Les Échos.

Pour la FFTélécoms, c’est à l’Europe d’agir. Elle espère que le futur Digital Networks Act, attendu dans les deux prochains mois à la Commission européenne, fixera un cadre clair à ces négociations. En face, les lobbys de la tech, regroupés au sein de la CCIA Europe, multiplient les réunions pour éviter toute introduction de « network fees », ces frais d’accès au réseau redoutés par les géants américains.

Un équilibre difficile à trouver

Entre la volonté de mieux taxer les mastodontes du numérique et la crainte de freiner l’innovation ou d’aggraver la fracture numérique, le gouvernement devra trouver une ligne de crête. Les débats promettent d’être animés dans les prochains jours à l’Assemblée nationale, alors que chacun tente d’imposer sa vision d’une fiscalité plus juste à l’ère du numérique.


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