Une méthode d’espionnage de haut vol : 14 personnes jugées devant le tribunal pour avoir détourné un système policier

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Une affaire rocambolesque secoue le monde de la fraude numérique en France. Quatorze personnes seront bientôt jugées à Paris pour avoir exploité un système de surveillance habituellement réservé aux forces de l’ordre pour dépouiller leurs victimes. Cette escroquerie sophistiquée illustre les risques croissants liés aux technologies d’interception et la créativité des malfaiteurs dans le piratage de données personnelles.

Un IMSI-catcher détourné pour escroquer

Leur outil ? Un IMSI-catcher, un dispositif normalement utilisé par les services de police ou de renseignement pour intercepter des communications mobiles. Baladé dans Paris et Lyon à bord de véhicules, ce système permettait d’envoyer des SMS frauduleux et de pirater les téléphones des passants.

L’enquête débute en octobre 2022 après une plainte d’Orange. Plusieurs clients avaient reçu des messages d’hameçonnage, notamment des arnaques liées aux comptes Ameli. L’opérateur a constaté que ces messages n’étaient pas passés par son réseau classique et que certains terminaux présentaient un comportement radio atypique. Selon ses observations, plus de 75 000 téléphones avaient été captés par cette fausse antenne relais.

Des SMS trompeurs et ciblés

Grâce à ce dispositif, les escrocs pouvaient envoyer des messages d’hameçonnage à tous les appareils détectés. Les messages se faisaient passer pour des organismes officiels comme Chronopost ou Ameli, dans le but de récupérer des coordonnées bancaires et de détourner de l’argent.

Un réseau bien organisé

Lors de la garde à vue, Zoé M., conductrice du véhicule, a expliqué que le dispositif lui avait été confié par un certain « Nounours ». *« Je recevais 100 euros par jour pour conduire doucement dans les rues de Paris et faire fonctionner le système via une application »,* a-t-elle déclaré. « Nounours », identifié comme Mohamed A., défavorablement connu des services de police, était chargé de recruter les conducteurs pour ce plan orchestré sur Telegram.

Les enquêteurs ont découvert, grâce à la vidéosurveillance d’un parking, un transfert du dispositif entre véhicules impliquant cinq personnes : Zoé M., Mohamed A., Wissale L., Sammy N., et Abdoulaye K., surnommé « Bouzou ». Ce dernier, cofondateur avec Mohammed M. de la société Scion Data Agency, spécialisée en conseil informatique, avait accès à des services de SMS marketing local et à la logistique pour orchestrer l’opération.

Une découverte explosive

Le 31 décembre 2022, la police a repéré un véhicule suspect à Paris dont la lunette arrière était totalement obstruée par un caisson gris. Après l’intervention des démineurs pour neutraliser le dispositif, les analyses ont confirmé la présence d’un IMSI-catcher, capable de capter les communications de téléphones portables et d’envoyer des messages frauduleux en masse.

Les enjeux d’une technologie détournée

Cette affaire met en lumière les dangers liés à l’usage malveillant de technologies de surveillance :

  • Collecte massive de données personnelles via fausse antenne ;
  • Envoi de SMS trompeurs pour extorquer des informations financières ;
  • Organisation logistique et recrutement via applications et réseaux sociaux ;
  • Exploitation commerciale détournée par des sociétés de marketing digital ;
  • Risques légaux et pénaux pour les individus impliqués.

Les escrocs ont montré comment un dispositif créé pour protéger et surveiller pouvait être transformé en outil criminel. Les victimes, souvent inconscientes de la manipulation, se sont retrouvées exposées à une fraude sophistiquée et difficile à détecter.

Vers un procès attendu

Quatorze individus sont désormais sur le banc des accusés, et le procès à Paris s’annonce suivi avec attention. Cette affaire souligne l’importance pour les entreprises et les particuliers de rester vigilants face aux nouvelles méthodes de piratage et de hameçonnage, et rappelle que même des technologies avancées peuvent tomber entre de mauvaises mains.

Alors que la justice s’apprête à trancher, cette histoire pose des questions cruciales sur la protection des données et la sécurité des communications mobiles dans un monde où la technologie évolue plus vite que la réglementation.


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