« Je me retrouve avec 21.000 euros de dettes » : l’usurpation d’identité, un fléau qui prend de l’ampleur en France

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Imaginez un jour recevoir une facture de 15.000 euros pour un crédit que vous n’avez jamais contracté, ou devoir justifier 80 infractions que vous n’avez jamais commises. Pour plus de 200 000 Français chaque année, ce cauchemar est bien réel. L’usurpation d’identité ne cesse de prendre de l’ampleur dans l’Hexagone, avec des conséquences dévastatrices pour les victimes. Et ce phénomène, alimenté par des réseaux organisés et des fuites massives de données, continue de prospérer.

Un crédit de 15.000 euros… sans le savoir

Aymeric Belles en a fait les frais. À la suite d’une simple candidature à une location, où il avait envoyé ses justificatifs classiques (pièce d’identité, RIB…), quelqu’un a récupéré ses informations pour souscrire un crédit à la consommation de 15.000 euros à son nom. « J’avais envoyé toutes les pièces, je pense que c’est là que tout a été récupéré« , explique-t-il. Une mésaventure qui n’est plus si rare.

Grâce au travail de son avocate, les poursuites ont fini par être abandonnées. Mais cela a pris des mois. « Ils mélangent des vraies et des fausses infos, c’est un vrai casse-tête pour prouver ce qui est vrai », souligne Me Marie-Camille Eck, avocate spécialisée. Selon elle, les escrocs profitent de la puissance des outils numériques pour fabriquer des identités parfaitement crédibles.

Une spirale infernale de dettes et d’amendes

Le cas d’un ouvrier du bâtiment est encore plus choquant. Depuis quatre ans, il reçoit des amendes pour des infractions routières qu’il n’a jamais commises. 80 au total. Il ignore toujours comment son identité a été volée. * »Je dois me précipiter à la banque tous les mois pour éviter qu’on me retire tout »*, raconte-t-il, épuisé. En tout, il s’est retrouvé avec une dette de 21.000 euros, dont 1.000 ont déjà été saisis par l’État.

« Plus je recevais des lettres, plus ça me nouait l’estomac. La nuit, je n’en dormais plus« , confie-t-il, encore sous le choc. Une angoisse permanente, qui bouleverse la vie quotidienne.

Des identités vendues pour une poignée d’euros

Comment ces voleurs opèrent-ils ? En ligne, des lots entiers de documents sont disponibles à prix cassé. Un expert en cybersécurité, Clément Domingo (alias Saxx), a réussi à acheter plusieurs pièces d’identité pour quelques dizaines d’euros. « On peut isoler la photo, la taille, la couleur des yeux et recréer un faux document crédible« , explique-t-il.

Les sources sont nombreuses : perte de papiers ; fuites de données dans les hôpitaux, entreprises ou administrations ; ou encore fausses annonces. Récemment, un cybercriminel a volé plus de 45.000 pièces d’identité françaises dans un hôpital. Ces données finissent sur le dark web, prêtes à être revendues.

« On peut trouver 1.000 pièces d’identité pour 50 euros, c’est totalement dérisoire« , confirme l’expert. Une aubaine pour les arnaqueurs, un cauchemar pour les citoyens.

Peut-on se protéger efficacement ?

Heureusement, il existe quelques outils simples pour limiter les risques. Si vous devez envoyer une copie de votre carte d’identité par mail, utilisez un site officiel du gouvernement pour y ajouter un filigrane personnalisé. Il permet de rendre inutilisable le document si quelqu’un tente de le réutiliser ailleurs. Cette précaution est désormais fortement recommandée.

Mais si vous découvrez que votre identité a déjà été volée, voici les bons réflexes à adopter :

  • déposer plainte au plus vite auprès de la police ou de la gendarmerie ;
  • se rendre sur le site cybermalveillance.gouv.fr pour accéder à des outils de vérification ;
  • demander le renouvellement de sa carte d’identité si vous soupçonnez qu’elle a été utilisée frauduleusement ;
  • informer votre banque et vos créanciers pour bloquer toute opération suspecte ;
  • surveiller vos relevés bancaires et vos données personnelles régulièrement.

« Ces gestes peuvent éviter que la situation n’empire« , prévient Jérôme Notin, directeur de cybermalveillance.gouv.fr. Il insiste aussi sur la vigilance : beaucoup de victimes ne découvrent le problème que lorsqu’il est déjà trop tard.

Un fléau en pleine expansion

L’usurpation d’identité ne touche plus seulement les célébrités ou les grosses fortunes. N’importe qui peut en être victime, à tout moment. La banalisation de ce phénomène doit alerter les pouvoirs publics et encourager chacun à prendre des précautions. Un simple mail ou une pièce jointe peut parfois suffire à changer une vie.

Alors que les escrocs se perfectionnent, il devient indispensable de mieux protéger nos informations personnelles, en ligne comme dans la vie quotidienne. Car aujourd’hui, votre nom, votre visage et vos données peuvent valoir de l’or pour les mauvaises personnes.


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