Désherber sans produits chimiques : la solution pourrait être électrique

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Une innovation prometteuse pourrait bientôt transformer la lutte contre les mauvaises herbes dans les vignobles : l’électricité. Des chercheurs australiens ont démontré qu’un courant électrique peut éliminer les mauvaises herbes aussi efficacement que les herbicides classiques ou la tonte, tout en évitant les produits chimiques et avec un risque d’incendie limité.

Des tests prometteurs dans les vignobles

Les travaux ont été menés par Catherine Borger et Miranda Slaven, du Département de l’Agriculture et du Développement régional de l’Australie-Occidentale. Leur équipe a utilisé le système Zasso XPower pour comparer le désherbage électrique avec les traitements classiques à base de glyphosate et la tonte pendant deux saisons printanières.

Les essais ont eu lieu en 2022 et 2023 dans quatre vignobles commerciaux près de Yallingup, une région viticole au climat frais au sud de Perth. La végétation était dense, composée de graminées annuelles telles que le rigid ryegrass et le veldtgrass à fleurs longues, ainsi que de légumineuses rampantes et de kikuyu résistant.

Pour appliquer le traitement électrique, les chercheurs ont monté une unité de 36 kW sur un tracteur équipé de panneaux d’électrodes rétractables pour atteindre le dessous des rangs de vigne. À une vitesse de 1 à 1,5 km/h, deux niveaux de puissance ont été testés : 48 et 32 chevaux.

Des parcelles parallèles ont été traitées avec un mélange classique de glyphosate et amitrole ou tondue à 5 cm.

Une alternative efficace aux herbicides

Cinq semaines après traitement, la récolte de biomasse a montré des résultats très encourageants. Le désherbage électrique a éliminé entre 84 et 87 % de la masse de mauvaises herbes, presque autant que les 88 % obtenus avec le glyphosate. La tonte n’a retiré que 65 % de la végétation.

Nous montrons que le désherbage électrique en viticulture peut être aussi efficace que les herbicides,” a déclaré Borger.

Les scans NDVI ont confirmé que les vignes elles-mêmes n’étaient pas endommagées par le courant, et la verdure des canopées et la croissance des pousses restaient identiques pour tous les traitements.

Un atout pour l’agriculture biologique

Les impulsions électriques détruisent les tissus végétaux et brûlent les racines, avec plusieurs avantages par rapport aux produits chimiques :

  • absence de résidus chimiques dans l’environnement ou les aliments ;
  • pas de période d’attente liée à la pluie après application ;
  • aucune restriction en cas de vent ;
  • pas de résistance chimique ;
  • aucun impact sur la végétation voisine ou les cours d’eau.

Ces bénéfices sont particulièrement importants pour la viticulture australienne, où plus de 6 % de la production est certifiée biologique et où certaines graminées résistantes aux herbicides menacent les parcelles conventionnelles.

“Le désherbage électrique sera particulièrement utile pour les viticulteurs biologiques,” ajoute Borger.

Limites et précautions

Cette technologie présente des contraintes, comme une vitesse d’application lente et une consommation de carburant élevée. Le risque d’incendie a été testé sur des parcelles couvertes de paille d’orge et de foin d’avoine très secs. Des étincelles apparaissaient uniquement lorsque la végétation était extrêmement sèche et que le tracteur avançait lentement. Doubler la vitesse réduisait les étincelles de 90 %. Dans des conditions printanières normales, aucune ignition n’a été constatée.

“Lors de tous nos essais au printemps, il n’y a eu aucun incendie. C’est la période la plus utilisée pour la gestion des mauvaises herbes en Australie-Occidentale, précise Borger.

Les chercheurs recommandent d’utiliser le désherbage électrique au printemps et en hiver dans les climats méditerranéens, mais pas pour les mauvaises herbes estivales ou automnales.

Vers une adoption pratique

Le désherbage électrique pourrait remplacer une ou deux applications d’herbicides au printemps, réduisant ainsi la charge chimique et ralentissant l’apparition de résistances. Les pulvérisations ou tontes classiques pourraient compléter le traitement pour éliminer les repousses plus tard dans la saison.

L’adoption pourrait s’accélérer avec l’arrivée des tracteurs autonomes, permettant des vitesses lentes sans coûts supplémentaires.

De futures études testeront les performances à des vitesses plus élevées, dans différents niveaux d’humidité du sol et contre des mauvaises herbes vivaces aux racines profondes.

Une solution durable pour l’avenir

En montrant que les désherbeurs électriques peuvent égaler l’efficacité des herbicides dans des conditions commerciales, Borger et son équipe apportent des preuves concrètes pour les viticulteurs et ouvrent la voie à une agriculture plus propre. Les données sur le risque d’incendie fournissent des indications précises pour une utilisation sûre et réfléchie.

Si les essais futurs confirment des résultats similaires dans les vergers et cultures en rangs, l’électricité pourrait devenir un pilier central de la gestion intégrée des mauvaises herbes, aidant à répondre à la demande des consommateurs pour des produits plus propres tout en préservant l’efficacité des herbicides.

L’étude a été publiée dans la revue Weed Science.


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