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Le Royaume-Uni franchit une étape majeure dans son retour au nucléaire civil. Le projet Sizewell C, considéré comme le plus ambitieux du pays, vient de recevoir l’aval financier officiel, avec un budget colossal de 43 milliards d’euros. Ce feu vert met fin à des années d’incertitudes, de négociations et de suspense autour de ce chantier hors norme.
Sizewell C : un investissement historique
Le coût du projet est estimé à 38 milliards de livres sterling, soit environ 43 milliards d’euros, ce qui en fait le programme nucléaire le plus cher jamais lancé au Royaume-Uni. Le chantier prévoit la construction de deux réacteurs EPR d’une puissance totale de 3 200 MW, capables d’alimenter plus de 6 millions de foyers pendant au moins 60 ans. Ce pari industriel traduit la volonté britannique de sécuriser sa production énergétique sur le long terme.
Le montage financier final inclut :
- 44,9 % de capital détenu par le gouvernement britannique ;
- 12,5 % pour EDF, soit 1,1 milliard de livres sterling ;
- 15 % pour Centrica ;
- Environ 20 % pour la Caisse de dépôt et placement du Québec ;
- 5 milliards de livres d’assurance crédit export garanties par Bpifrance Assurance Export côté français ;
Des acteurs français au cœur du chantier
La France joue un rôle central sur le volet génie civil. Bouygues Construction, via l’alliance CWA, a été retenu aux côtés des britanniques Laing O’Rourke et Balfour Beatty pour réaliser les travaux lourds. Ces travaux comprennent :
- terrassements ;
- tunnels sous-marins, dont trois de 3 km ;
- îlots nucléaire et conventionnel ;
- stations de pompage, voiries et réseaux ;
Le chantier mobilisera plusieurs centaines de milliers de tonnes de béton et de structures métalliques. Le carnet de commandes de Bouygues Construction sur Sizewell C s’étendra jusqu’en 2030, pour un montant total estimé à 3,3 milliards d’euros.
Feuille de route du projet
Le projet est déjà en cours depuis quelques années, avec des étapes clés :
- Feu vert gouvernemental : 22 juillet 2025 ;
- Bouclage financier : 4 novembre 2025 ;
- Travaux préparatoires : 2024–2025, incluant fondations, terrassements et tunnels maritimes ;
- Démarrage du gros œuvre : 2025–2026, coulage du béton et structures principales ;
- Livraison estimée : fin des années 2030, avec mise en service progressive des réacteurs ;
Le retour du nucléaire britannique
Sizewell C ne sera pas isolé : il complète Hinkley Point C, déjà en construction dans le sud-ouest du pays. Ces deux projets visent à relancer une filière industrielle historique, à remettre en activité écoles d’ingénieurs et sous-traitants, tout en diminuant la dépendance aux énergies fossiles et au gaz importé.
Le projet devrait générer :
- 8 000 emplois directs en phase de pic ;
- 60 000 emplois indirects ;
- 1,5 milliard de livres sterling d’impact économique local ;
Pour autant, les défis restent nombreux. Les retards et dépassements budgétaires des EPR sont connus, comme à Flamanville. Le gouvernement britannique a toutefois promis de ne pas dépasser les 43 milliards malgré l’inflation dans le secteur BTP.
Une coopération franco-britannique exemplaire
EDF Energy pilote Sizewell C. Le réacteur EPR, modèle français développé par Framatome, assure un haut niveau de sécurité et d’efficacité. Parmi les autres acteurs français engagés :
- Framatome : fourniture des équipements nucléaires majeurs et ingénierie associée ;
- Bouygues Construction : travaux de génie civil via l’alliance CWA ;
- Equans (ex-Engie Services) : expertise sur les systèmes industriels et facility management ;
Cette présence française massive souligne le savoir-faire hexagonal et le rôle central de la France dans la relance nucléaire européenne. Sizewell C sera adjacent à Sizewell B, unique réacteur pressurisé britannique en service, déjà fourni par EDF, renforçant ainsi une collaboration de plus de 30 ans.
Des incertitudes à surveiller
Le projet reste soumis à certaines contraintes :
- Opposition locale et contraintes environnementales sur une zone côtière fragile ;
- Coordination de 40 lots de génie civil ;
- Transparence sur l’utilisation des fonds publics dans un climat politique tendu ;
- Défi technologique : industrialiser la construction d’EPR dans des délais soutenables ;
Malgré ces obstacles, le lancement de Sizewell C marque un tournant pour l’industrie nucléaire britannique et une vitrine du savoir-faire français à l’international. La route est longue, mais le chantier est désormais engagé et promet de transformer durablement le paysage énergétique du Royaume-Uni.

