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La solitude des personnes âgées n’est plus un phénomène marginal. Selon les derniers chiffres publiés par les Petits Frères des pauvres, près de 750 000 seniors vivent aujourd’hui en situation de mort sociale, sans aucun contact physique régulier avec leur famille, leurs amis ou leurs voisins. L’association tire la sonnette d’alarme à la veille de la journée internationale des personnes âgées, alertant sur une hausse continue de ce phénomène depuis plusieurs années.
Un record inquiétant pour les plus de 60 ans
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En seulement quatre ans, le nombre de personnes âgées vivant en isolement total a augmenté de 42%, passant de 530 000 en 2021 à 750 000 en 2025. En 2017, elles n’étaient que 300 000. Si la tendance se poursuit, les Petits Frères des pauvres estiment que ce chiffre pourrait atteindre un million d’ici 2030, en raison du vieillissement de la population. Yann Lasnier, délégué général de l’association, parle d’une « explosion de l’isolement social des aînés ».
Aujourd’hui, 4% des plus de 60 ans sont concernés par la mort sociale, soit le double par rapport à il y a huit ans. Plusieurs facteurs expliquent cette progression : l’augmentation du nombre de seniors, les séquelles sociales du Covid-19 et la montée de la pauvreté chez les personnes âgées. Les plus touchés sont :
- Les personnes âgées les plus pauvres, avec 9% concernées ;
- Les seniors sans enfants ni petits-enfants, également 9% ;
- Les plus de 80 ans, à hauteur de 6%.
L’isolement touche désormais un tiers des seniors
Au-delà des cas extrêmes, l’isolement relationnel touche un nombre encore plus large de seniors. Près de 30% d’entre eux ne voient jamais, ou presque jamais, un membre de leur famille. Avant la crise sanitaire, ils étaient seulement 22%. L’isolement s’étend aussi aux autres cercles sociaux :
- 30% n’ont pas de contacts réguliers avec leurs amis (+2 points depuis 2017) ;
- 26% ne voient pas leurs voisins régulièrement (+5 points) ;
- 62% n’ont aucun échange avec des associations (+7 points).
Anne Géneau, présidente des Petits Frères des pauvres, s’inquiète : « On pensait que l’aggravation constatée en 2021 était un accident lié au Covid, mais ce n’est pas le cas. On n’est pas revenu aux niveaux d’avant-crise. » Les interactions avec les commerçants et professionnels de proximité diminuent également, avec moins d’un échange par mois pour 30% des seniors.
La fracture numérique s’aggrave
L’isolement ne se limite pas aux contacts physiques. L’usage d’internet, qui avait progressé pendant la pandémie, recule à nouveau. Quentin Llewellyn, de l’institut CSA, explique : « De nombreuses personnes âgées en viennent à sacrifier leur abonnement internet pour des raisons financières. » Le taux de seniors n’utilisant jamais internet est passé de 20% en 2021 à 27% aujourd’hui. La peur des arnaques ou des piratages contribue aussi à cette exclusion numérique.
Deux millions et demi de seniors se sentent souvent seuls
Au total, près de 6 millions de personnes âgées ressentent la solitude au moins de temps en temps, dont 2,5 millions quotidiennement ou très régulièrement. Les plus affectés sont encore une fois les seniors les plus âgés et les plus précaires. Pour Yann Lasnier, « Ce baromètre est un cri d’alerte. L’isolement des personnes âgées n’est pas une fatalité, mais un enjeu de société que les pouvoirs publics doivent enfin prendre à bras-le-corps. »
L’association déplore l’absence de politique cohérente dans le secteur du grand âge, qui a vu passer sept ministres en quatre ans. Elle insiste sur la nécessité de renforcer le lien social, d’identifier plus efficacement les personnes seules et de chiffrer le coût économique de cette solitude, qui pourrait représenter chaque année des milliards d’euros en raison de ses conséquences sur la santé et l’autonomie des seniors.
Un appel à l’action pour rompre l’isolement
Les Petits Frères des pauvres rappellent que l’isolement des seniors n’est pas une fatalité. La société tout entière est concernée : famille, voisins, associations et pouvoirs publics doivent agir pour préserver le lien social et offrir aux personnes âgées un quotidien moins solitaire. La solitude n’épargne personne et chaque geste de proximité peut faire une différence réelle pour des milliers d’aînés.